La guerre ne peut avoir qu’un effet délétère sur le psychisme humain par l’intervention d’au moins trois facteurs :
- La guerre renvoie aux penchants primitifs de l’homme et s’étaye sur leurs pulsions de destruction ;
- Les nations, les peuples pourtant civilisés appellent à la transgression d’un interdit suprême : l’interdit de l’homicide ;
- Un tel traumatisme soulève une telle quantité d’excitation que l’organisme ne peut la contenir ni la gérer.
Par la force de ses trois facteurs (ce que Freud nomme « influences exercées par la guerre »), une régression pulsionnelle s’établit, « un retour en arrière ».
La guerre s’appuie sur les penchants primitifs de l’Homme
Dans Considérations actuelles sur la guerre et sur la mort, Freud fait remarquer que la guerre n’a fait que mettre en lumière ce que les psychanalystes savaient déjà depuis longtemps à propos de l’agressivité humaine. En décembre 1914, il dit au psychopathologiste et poète hollandais Frédérik Van Eeden que les psychanalystes avaient appris à la fois par l’étude des rêves, des actes manqués et des symptômes névrotiques que les élans primitifs de l’Homme n’avaient pas disparu mais qu’ils continuaient d’exister de façon refoulée n’attendant qu’une occasion de réapparaître.
Le climat de destruction et de mort que la guerre impose entraîne une régression pulsionnelle résultat de la désunion des pulsions de vie et des pulsions de mort.
La guerre – une transgression de l’interdit de l’homicide au niveau collectif amenant à un retour en arrière des pulsions
Les nations les plus civilisées et cultivées du monde, où sont nés de grands philosophes, des poètes, des musiciens, ont été aussi les plus meurtrières et inhumaines.
Concernant la brutalité des individus, la position de Freud ne variera pas. L’homme est un être pulsionnel, ses pulsions demandent satisfaction sans considération pour des motifs moraux. Les formulations de Malaise dans la culture sont célèbres : l’homme n’est pas un être doux, en besoin d’amour, qui serait tout au plus contraint de se défendre quand il est attaqué ; il compte parmi ses pulsions un très fort penchant à l’agressivité. Freud reprend la formule de Hobbes : « l’homme est un loup pour l’homme ». L’altruisme, le dévouement sont des formations réactionnelles à la culpabilité ou à la peur de perdre l’estime ou l’amour de ceux dont il dépend. En aucun cas ces vertus ne sont « naturelles ». L’éducation et la culture apprennent à l’homme à renoncer à la satisfaction immédiate de ses pulsions.
C’est la raison pour laquelle un des facteurs de la désillusion face à la guerre est celui qui provient de la brutalité des États soi-disant civilisés. La barbarie des nations vient redoubler celle des individus. Il n’y a plus rien à attendre pour limiter les penchants pulsionnels : ni d’une contrainte externe, ni d’une éducation ou d’une obéissance à un principe supérieur. D’où la conclusion de Freud dans son essai : « Tout se passe comme si toutes les acquisitions morales des individus s’effaçaient dès lors qu’on réunit une pluralité (…), et qu’il ne restât plus que les attitudes psychiques les plus primitives, les plus anciennes et les plus grossières ». Le nombre balaie la culture, et le meurtre de masse que la guerre impose détruit un monde de culture et impose l’idée d’une mort de masse, idée poursuivie dans Psychologie des foules et analyse du moi (1921) : « La foule (…) montre les signes d’affaiblissement du rendement intellectuel et de désinhibition de l’affectivité, l’incapacité de se modérer et de temporiser, la tendance au dépassement de toutes limites dans l’expression des sentiments et à leur décharge totale dans l’action, (…), donne une image évidente de régression de l’activité psychique à un stade antérieur comme celle que nous ne sommes pas étonnés de trouver chez les sauvages ou chez les enfants ».
L’Homme se pense immortel
L’inconscient ne croit pas à la mort et se conduit comme s’il était immortel ; la tendance à l’héroïsme découlerait de telles motivations ; celui qui a donné sa vie à la nation acquiert une forme d’immortalité héroïque consacrée par les institutions. Ainsi, seule la culture, l’art et la psychanalyse peuvent endiguer ce besoin de destructivité. La culture permet à l’homme de se protéger des lois de la nature et d’organiser une réglementation des relations humaines.
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