Quels sont les effets du jeûne sur le corps et sur l’esprit ?
L’homme religieux et probablement l’homme malade (comme le font spontanément les animaux) ont toujours jeûné. Hippocrate (400 avant J-C) « le père de la médecine » préconisait déjà le jeûne comme remède.
Cependant, évoluant depuis des décennies dans une société de sur-consommation, les adeptes du jeûne, devenus fort peu nombreux, sont parfois perçus comme des personnes décalées ou mettant leur vie en danger.
Les cures de jeûnes, les nouveaux régimes basés sur le principe du jeûne intermittent, les jeûnes thérapeutiques soulèvent bon nombre de polémiques, de critiques et de peurs :
« C’est dangereux ! »
« C’est le meilleur moyen pour tomber dans l’anorexie ! »
« C’est pour les gens qui aiment se faire mal ! »
Alors qu’en est-il exactement ?
Je vous propose dans cet article, une fois n’est pas coutume, de balayer rapidement l’histoire du jeûne (ce qui donne une indication sur l’ancrage symbolique de cette pratique), ses effets physiologiques sur le corps pour seulement en aborder ensuite ses représentations inconscientes et la manière dont le psychisme y fait avec la privation de nourriture.
Le jeûne et son lien avec la question religieuse :
Le jeûne a, de tous temps, tenu une place dans les religions humaines. Le Carême est la période de jeûne de 40 jours qu’observaient les chrétiens ; le Ramadan est la période pendant laquelle les musulmans se privent de boire et manger du lever au coucher du soleil. Chez les juifs, le jeûne permet d’expier ses fautes ou de solliciter le pardon.
Outre la pratique du jeûne inscrite dans les 3 grandes religions monothéïstes citées, on retrouve ces périodes de jeûnes dans de nombreuses autres communautés humaines.
La pratique du jeûne y est inscrite comme le moment où les croyants peuvent se centrer sur le spirituel, se détachant de tout élan du corps et de toute faiblesse matérielle.
Ainsi l’on devine déjà que mettre son organisme au repos permet de centrer son énergie sur son âme… parce que, oui, manger et digérer sont des actes qui consomment beaucoup d’énergie !
Le corps est bien plus mal adapté à une nourriture apportée en excès qu’à une privation de nourriture :
Dans l’ère de la sur-consommation que nous traversons, nous avons pu observer une montée en puissance des maladies du métabolisme, appelées d’ailleurs très justement « maladies de la civilisation » : diabète, hypertension, obésité, maladies cardio-vasculaires, cancers, etc… Je ne vous apprendrai rien en disant que ce n’est pas une calamité pour tout le monde, au contraire, l’industrie pharmaceutique s’en frotte les mains, d’autant que la plupart de ces maladies sont chroniques.
Ces maladies sont provoquées, la plupart du temps, par un excès de nourriture et par un régime alimentaire déséquilibré, trop riche en sucres et en mauvaises graisses. La logique voudrait que l’antidote soit le jeûne, non ?
Qu’en est-il exactement ?
Avec le régime alimentaire moderne, composé de 50% de glucides, 15% de protéïnes et 35% de lipides, le carburant utilisé par le corps humain est le glucose. Pourquoi ? Parce que le glucose est une énergie qui ne nécessite pas de transformation métabolique, il est donc immédiatement disponible et apporter en continu dans le corps.
En cas de trop grande consommation de sucre par rapport à la dépense énergétique, celui-ci est transformé en graisse afin d’être stocké pour faire face aux périodes de disette.
Il faut donc bien prendre conscience que si le corps grossit en cas de sur-consommation, c’est pour être capable de s’adapter aux périodes pendant lesquelles les sources d’alimentation manquent… Ce n’est pas pour embêter les dames qui aimeraient frimer en maillot de bain sur les plages mais bien un mécanisme de protection auquel l’espèce humaine doit sa survie.
Que se passe-t-il dans le corps lorsqu’on jeûne ?
Ainsi, si l’on cesse de s’alimenter, c’est le processus inverse qui se déclenche. Après avoir épuisé son stock de glucose immédiatement disponible, le corps va, dans un premier temps, se mettre à en produire lui-même à partir de ses protéïnes via le processus de la néoglucogénèse. Le corps humain étant bien fait, et sachant que la préservation de notre stock de protéïnes est une condition à notre bonne santé, le corps va rapidement cesser de dégrader ses protéïnes, grâce à la mise en œuvre du phénomène de la cétogénèse.
La cétogé… quoi ???
La cétogénèse est un processus métabolique par lequel le foie va transformer les graisses stockées dans le tissu adipeux en corps cétoniques.
Les corps cétoniques constitueront alors la nouvelle source d’énergie de l’organisme.
(J’ouvre une parenthèse pour rappeler, à toutes fins utiles, que ce fonctionnement métabolique était celui prioritairement actif avant la naissance de l’agriculture il y a 10 000 ans ; agriculture qui a eu pour effet de modifier l’équilibre alimentaire humain : les céréales cultivées ont, depuis lors, représentée la plus grande source de notre alimentation.)
Les corps cétoniques comme carburant ne représentent pas une anomalie métabolique ni un fonctionnement pathologique de l’organisme. En revanche, une concentration trop forte de corps cétoniques dans le sang aura pour conséquence de faire chuter son pH, ce qui engendrerait un état d’acidose. L’acidose est le plus grand risque lié à l’état de cétose.
Mais alors pourquoi les corps cétoniques se concentreraient-ils ainsi dans le sang ?
Parce qu’ils ne sont pas assez utilisés, pardi !
C’est pourquoi lors d’un jeûne, il est indispensable de pratiquer une activité physique douce afin que ce nouveau carburant soit utilisé et ne reste pas en circulation dans le sang à des taux trop élevés.
Ceci étant posé, vous devez bien vous demander « Mais pourquoi Caroline s’intéresse-t-elle aux corps cétoniques ? Elle a craqué ? Elle arrête la psychanalyse pour devenir biochimiste ? »
La psychanalyse s’intéresse au phénomène de la cétose parce que les corps cétoniques ont la particularité d’avoir un effet euphorisant…
En conclusion, lors d’un jeûne :
- l’organisme est au repos,
- le système digestif n’est pas actif,
- les corps cétoniques, devenus la seule source d’énergie, stimulent, éclairent et euphorisent l’esprit,
- le jeûne est une pratique en lien avec l’oralité
Ahhhh mais on commence à entrevoir quelque chose là, non ?
Le jeûne et sa résonance inconsciente :
Alors, je reprends pour les deux du fond :
- Effet euphorisant, état de plénitude,
- Organisme au repos,
- Aucune fonction intestinale,
- Une impression de planer… devrais-je plutôt dire de flotter…
Cette image ne vous vient-elle pas à l’esprit ?
Et oui, il s’agit des caractéristiques des sensations du foetus In Utero !
Alors, bon, OK admettons… mais du coup, pourquoi la plupart des gens ont peur du jeûne ? Pourquoi certaines personnes se lançant dans l’aventure peuvent être prises d’angoisses très fortes ?
Réponse en image :
A la naissance, la prise alimentaire était complètement confondue avec la sécurité vitale et affective : en plus de sucer son sein, bébé était enveloppé des bras de la maman, bercé par sa voix, rassuré par son odeur… et bébé était entièrement dépendant de sa mère. Sans la mère (ou son substitut), le bébé était en danger de mort. C’est cette angoisse que l’idée de jeûne vient réactiver.
Ainsi, d’une certaine façon, se priver de nourriture est une manière de se détacher de cette mère qui avait pour rôle de nous maintenir en vie. Aujourd’hui, étant adultes, nous sommes capables de nous maintenir en vie seuls, certes, mais le jeûne peut effrayer car ça nous renvoie à ce moment où l’on était totalement dépendant de la mère.
En d’autres termes, la pratique du jeûne est une tentative de désaliénation… Et voilà pourquoi le jeûne éclaire l’esprit, pourquoi le jeûne permet de se brancher spirituellement et de se défaire de toute considération matérielle.
En outre, la zone buccale n’étant pas occupée par la nourriture, la période du jeûne peut être une période propice à la parole. Le fait de s’engager dans une cure encadrée par des professionnels est donc un véritable plus puisque les professionnels sont là également pour accueillir la parole, avec la libération émotionnelle qui peut l’accompagner.
Dernier point que je souhaitais vous soumettre et sur lequel je mets une alerte : ne plus s’alimenter peut également avoir pour fonction d’avoir l’illusion de contrôler son corps entraînant une jouissance de ce pouvoir sur soi-même. Les professionnels doivent être vigilants afin de ne pas encourager cette volonté de domination du corps. L’objectif du jeûne ne se situe pas au niveau d’un quelconque pouvoir mais bien au niveau d’une reconnexion spirituelle.
Votre rapport à l’alimentation vous explique quelque chose, apprenez à le décoder 😉
Pour compléter cet article, je suis allée à la rencontre de Karine Gerbi, Naturopathe à Roquebrune-Cap-Martin, organisatrice de ce séjour Détox pendant lesquels les participants sont amenés à jeûner.
Elle nous parle de son expérience du jeûne mais également de ses effets si particuliers que le jeûne procure sur le corps et sur l’esprit de ses clients :
Interview du 17 juin 2022 – Karine Gerbi Naturopathe à Roquebrune-Cap-Martin
- Bonjour Karine, vous êtes Naturopathe et vous organisez régulièrement des séjours de jeûne. Comment abordez-vous ces séjours ?
Karine G : Ce sont des séjours bien être ni plus ni moins, des vacances où chaque personne est juste là pour prendre soin d’elle sans s’occuper de rien. Combien de femmes et maintenant même les hommes s’y mettent, rêveraient d’être pris en charge du matin au soir dont leur seul intérêt est leur bien être intérieur ??? Tout le monde je crois, adore se faire chouchouter et se sont des moments si rares dans une vie.
Ma mission est de gérer toute la logistique et l’accompagnement de l’humain (de 8h30 à 20h30) de façon à ce que le jeûne ne soit plus au centre du séjour mais plutôt comme un élément parmi d’autres. Oui les journées sont ponctuées d’évènement et d’activités de sorte que l’attention soit détournée.
- Y a-t-il une préparation physique et mentale à respecter avant de se lancer ?
Karine G : Oui bien sûr il y a une préparation, car le jeûne se fait en 5 étapes, chacune tout aussi importante :
1) La décision : le jeûne est quelque chose qui se décide, on ne se force pas à jeûner. Le cerveau doit prendre la décision.
2) La descente alimentaire : c’est le retrait de certains aliments afin de préparer le corps physiologique à jeûner
3) Le jeûne : la période de jeûne à proprement dite.
4) La reprise alimentaire : est de réintégrer certains aliments progressivement pour ne pas abîmer son système digestif qui a été privé de nourriture.
5) Le retour à la vie normale avec certaines prises de conscience, puisqu’on ne ressort pas indemne d’un jeûne dans le bon sens du terme bien sûr.
- Avez-vous observé des changements de comportements ou des changements émotionnels chez les jeûneurs que vous accompagnez pendant ces séjours ?
Karine G : Chaque jeûneur est une personne différente et évolue de façon différente tout au long du séjour. Oui il y a des changements d’état en permanence : émotions, fatigue, douleur, puis regain d’énergie, etc. Encore là ma mission est de faire en sorte de libérer la parole de chacun, très important, peu importe ce qu’ils leur passent par la tête, je suis là pour les écouter sans aucun jugement et je pense qu’ils l’ont bien compris, puisqu’ils reviennent 😃
- Votre calme et votre bienveillance rassurent beaucoup les jeûneurs. Mais j’imagine que le cadre est également essentiel pour qu’ils se sentent enveloppés et sécurisés. Dans quel cadre « cocooning » les accueillez-vous ?
Karine G : Oui c’est vraiment un tout, le concept de Détoxinn : les petits groupes (6 personnes maximum), les appartements individuels répartis au coeur du village de Roquebrune-Cap-Martin, tous les départs de randonnée se font au départ du village à aucun moment nous prenons un véhicule, la situation géographique est juste exceptionnelle le village surplombe la mer méditerannée, mon lieu : oui j’ai créé un espace où l’on se retrouve qui apporte sérénité et bien être, et je garde le meilleur pour la fin tous mes partenaires sont CHOISIS avec beaucoup de précaution.
Tous ces ingrédients rendent le séjour magique !!!
- Merci Karine pour vos éclairages précieux
Karine G : Merci à vous
Si vous éprouvez des difficultés à surmonter votre stress, n’hésitez pas à me contacter :